Ouvrez la porte, laissez le sortir, laissez le tracer des lignes de brumes dans le ciel matinal. Il vole loin de l’aurore éternelle, à qui il ne laisse que des plumes en pierres précieuses. Il est partit le petit canari, la fête est finie. Aurore atterrit tandis que l’oiseau, lui, continue de voler…

Pourquoi dormait-elle ? Ah oui, pour répondre à ce besoin de sommeil si ennuyeux. Dormir est parfois agréable, surtout quand l’esprit continue à parler au corps sous forme de rêves étranges. Mais être obligé de fermer les yeux, durant un instant quitter son petit monde de foire pour le noir complet. Ça fait longtemps que tu ne rêves plus Aurore, mais ce soir, est-ce un cauchemar ?
Non c’est juste une cage au cadenas brisé. Vide, délaissée. Les coups donnés à répétions avaient eu raison du verrou mais n’avait pas éveillé la méfiance de Aurore qui dormait tout comme elle. On en arrivait là, à une jeune femme qui ne trouvant plus le sommeil s’était levée, avait décidée de voir quel pantin pouvant bien ainsi tirer sur ses fils. Rien de tout cela. C’était une ombre, qui visiblement portait une étoffe bleue, qui s’était glissé là et avait tout simplement coupé les fils du pantin. Enfin, a ouvert la cage de l’oiseau tout sage, désormais perdu dans un ciel d’encre.
Les lèvres serrées, la directrice hésitait entre le rire et le cri. La stupéfaction avait vidé ses yeux de toute émotion si bien que l’on pouvait voir par transparence l’objet brisé à ses pieds. Elle ne cessait de serrer l’étoffe dans sa main gauche, tentant avec l’autre de mettre le doigt sur une idée, une pensée qui ne soit pas floue, quelque chose qui ne s’évapore pas dans un méandre indescriptible.

D’une manière automatique, ses pas la conduisirent à la roulotte de Grey. Au fur et à mesure de sa marche ses lèvres se desserraient, laissant échappé un son aigue, ni tout à faire rire, ni tout à fait colère, on hésitait encore. Mais ce fut finalement un hurlement rageur qui s’exprima lorsqu’elle poussa la porte du rouquin qui interrompit une mélodie.
La vision n’était pas des plus éclatante, ses cheveux étaient en bataille tout comme ce qui se passait dans sa tête. Elle avait enfilé en hâte une robe légère pour sortir et portait par-dessus une veste stricte, peu lui importait le contraste, peu lui importait ses artifices, elle ne savait même pas si elle était encore maquillée.
Son cri était la seul chose concrète, sa démarche légèrement chancelante et son regard vide n’exprimaient rien si ce n’est de la confusion. La jeune femme trouva appuie contre le mur, ses mèches roses voilaient son regard. On l’entendait marmonner quelque chose.

- Il l’a ouverte, il l’a ouverte ! L’oiseau vole, mais lui court toujours…

Aurore se redressa légèrement, observa avec dédain l’étoffe de tissu toujours dans sa main, puis la jeta au pied du roux :

- RAMENES LE MOI !

Sa voix se brisa dans sa gorge et à nouveau elle se laissa aller contre le mur, cette fois émettant un petit rire. Après tout l’imprévu c’est tellement drôle, et parfois douloureux. Tandis qu’elle restait là appuyée, elle n’entendit même pas Grey qui sortait sans un mot.

L’oiseau s’envole, mais elle reste ici. L’oiseau fait ce qu’il veut définitivement et se rit de ceux qui restent au sol, et rit plus encore celui qui ouvre la porte…
Tout cela n’a aucune importance puisqu’à présent, il y a une cage de libre dans le Dark Wood Circus.